vendredi 18 mai 2007

Sourire jaune !

Effectivement ma lecture de l'Éloge de l'Incertitude de Rafi Haladjian a été rapide puisque me voilà aujourd'hui près à vous en dire deux mots.
Ce livre m'a fait beaucoup sourire, voir même rire franchement pas plus tard que lors de mon trajet de retour en métro il y a seulement quelques minutes.

S'il m'a fait rire c'est qu'il est plein de ces "vérités vraies" qui font notre quotidien sans que l'on n'y fasse plus attention que ça; jusqu'à ce que l'on nous incite à porter nos yeux dessus. Et c'est tout à fait ce que fait ce livre qui, écrit en 2002, est à la fois tout à fait dans son époque mais, hélas et comme le souligne son épilogue de 2005, encore très (trop) d'actualité.
Je ne suis pas sûr qu'une personne ne travaillant pas dans le domaine de l'informatique (au sens large) accroche véritablement à ce livre qui traite essentiellement du pourquoi du comment de l'éclatement avec pertes et fracas de la fameuse "bulle Internet" en 2001~2002. Cet effondrement de la "Nouvelle Économie" d'alors, Rafi Haladjian l'analyse par le petit bout de la lorgnette, si l'on veut, puisqu'il construit sa brillante démonstration par la domination incontestée dans les entreprises de trois outils Micro$oft devenus incontournables et ce quelque soit notre niveau de décision dans l'entreprise: PowerPoint, Excel et Word.

Rafi Haladjian épingle en particulier d'une part les financiers qui n'y comprennent rien en technique et, frileux par nature, craignent l'Incertitude (avec un grand "i") plus que tout. Logiquement vient alors le tour des demandeurs de capitaux qui savent bien eux que leur marché est très incertain mais ne peuvent faire autrement que de se transformer en conteur des milles et une nuits en s'auto-certifiant "OAPAT" (On A Pensé A Tout) et en racontant grâce à PowerPoint une belle histoire, très simple et même simpliste, et où les gentils gagnent à la fin. Ce conte à dormir debout est accompagné du sacro-saint business-plan: un tableau incompréhensible généré sous Excel avec graphe qui va bien et prouve le succès garanti de l'entreprise sur les années à venir.

Les consultants, dont je fais partie comme certains le savent ou l'auront déjà compris, ne sont pas épargnés. Et je souriais forcément jaune à voir révélé au grand jour par Rafi Haladjian l'usage honteux qui est bien souvent fait de Word en particulier dans notre profession où la qualité de notre travail n'est souvent plus du tout estimée que par le kilométrage textuel généré dans un document Word qui ne sera de toutes façons jamais lu.

Il m'est en effet arrivé dans ma carrière de bosser des heures et des heures par exemple que des réponses techniques à des appels d'offres pour me rendre compte à la présentation avec les achats que de toutes façons personne parmi les présent n'avait vraiment lu mon document et j'ai alors regretté de ne pas avoir fait comme certains (que je ne dénoncerai pas ici faut pas pousser ;)) et généré un document "patchwork" regroupant des sources diverses et variées afin d'en sortir un document que je me demandais naïvement alors que je n'avais pas encore lu le livre d'Haladjian, comment il était donc possible qu'ils s'en sortent avec.

Car apparemment je fais partie de ce très faible pourcentage de gens qui, au contraire, s'amuse à décortiquer ces documents patchwork. De ceux qui systématiquement regardent les propriétés des documents. Et là c'est marrant car si Haladjian soulève un tests auquel je dois bien l'avouer, je n'avais jamais fait attention (celui de regarder le temps d'édition véritable du texte) plus simplement je regarde juste le nom du créateur et le titre du document ce qui trahi dans une très grande majorité des cas le recyclage dont il est issu, quand les titres de bas de page ne l'on pas déjà fait (comme par exemple dans le dernier Cahier Des Charges que j'ai reçu).

Jusqu'à ce que ce livre finisse par me convaincre de l'horreur et de la superficialité de mon monde professionnel, j'étais encore ébahi que personne ne voit au premier coup d'œil par exemple les changements de style dans la forme, confirmés dans la forme avec une lecture plus attentive de la plupart des documents que l'on voit circuler.

Du coup je m'inquiète. Alors qu'au fil de ma lecture je me disais: "il faut que je parle de ce livre" à untel ou tel autre. Au final je me dis complètement l'inverse. Peut être que si tout le monde se met à lire ce bouquin, une paranoïa que je ne comprends toujours pas qu'elle ne soit pas apparue, va se propager et la virtualité de notre monde apparaître au grand jour alors qu'il semble qu'un très grand nombre de décideurs et investisseurs semblent encore croire dur comme fer que nous sommes dans un monde bien tangible qui a disparu depuis belle lurette... Mais qui l'alimentera si les illusions perdues des uns ferment leur porte-feuille ?

Bon... ne m'en veuillez pas si c'est fouilli comme texte mais à ma décharge j'ai à ma droite une Liewen très impatiente de me montrer un site qu'elle a découvert et il est donc fort possible que je repasse plus tard éditer mon texte et y mettre un peu d'ordre une fois que je l'aurai relu. En tous cas cela fait plaisir de savoir que si personne ne lit mes rapports (snif !) au moins quelques uns lisent ces quelques lignes :D

Bonne soirée !

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